26 janv. 2011

Encore une fois

Encore une fois il est tard et ma vitalité intellectuelle tangente le néant. Je n'arrive pas à achever certains billets qui continuent à stagner à la frontière entre l'être et le néant.

Je consacre beaucoup d'énergie à ne pas décrocher de ma deuxième année de Japonais. Presque tous les soirs, je révise mes leçons, j'apprends mon vocabulaire et je fais mes devoirs. Un vrai petit écolier.

Je ne suis pas très sûr de savoir pourquoi je continue à apprendre le Japonais. Il y avait au départ cette grande attirance pour la culture nippone - celle qui transparaît dans les films et séries d'animation. Il y avait aussi ce projet de voyage au pays du soleil levant, devenu avec les années une véritable arlésienne. Je n'ose plus répondre lorsqu'on me demande: "Alors, ce voyage au Japon, c'est pour quand?". Tout cela n'est plus trop d'actualité.

Mais bien que je n'aie plus de raison bien identifiée de poursuivre l'apprentissage de la langue, je ressens tout simplement du plaisir à l'entendre et à la pratiquer - à mon modeste niveau bien sûr. Il faut dire que le Japonais parlé est aussi rythmé qu'une chanson de Michael Jackson, et qu'il nous propulse à chaque fois dans un grand huit d'accentuations, que je trouve très musicales.

Et puis il y a les kanjis qui, s'ils sont souvent de vrais casse-têtes à mémoriser, n'en demeurent pas moins des compositions fascinantes et mystérieuses. Les tracer une fois, cinq fois, dix fois me procure une satisfaction que je ne m'explique qu'en partie. C'est vrai que j'apprécie de manière générale le contact du crayon gris sur le papier, le chuintement de la mine de graphite sur les fibres de cellulose, mais il y a autre chose. Dessiner des kanjis réveille en moi quelque chose que l'on pourrait peut-être considérer comme une sensibilité artistique.

Quelle inattendue conclusion.

22 janv. 2011

Vocabulaire

Sans doute sommes-nous nombreux à prendre la résolution de chercher dans le dictionnaire les mots que nous découvrons au gré de nos lectures et dont nous ne connaissons pas le sens. Résolution non tenue dans mon cas la plupart du temps.

Cette fois, pour m'y tenir, je me suis dit que je consacrerais un billet aux mots appris lors de ma dernière lecture. Les voici :

Mauresque: n.f. Pastis additionné de sirop d'orgeat.

Tantrisme: ensemble de croyances et de rites issus des tantra et relevant de l'hindouisme, du judaïsme et du bouddhisme tardif (Le tantrisme se donne comme but le salut par la connaissance ésotérique des lois de la nature).

Priapisme: érection pathologique du pénis prolongée et douloureuse, non liée à une stimulation érotique.

Uniment: (Litt.) de façon égale, uniforme.

Escarbille: n.f. (mot wallon). Petit fragment de charbon incandescent qui s'échappe d'un foyer, principalement de celui d'une locomotive à vapeur.

Phalanstère: n.m. Vaste association de production au sein de laquelle les travailleurs vivent en communauté, dans le système de Fourier.

Munificence: disposition qui porte à faire des libéralités, à être très généreux.


Ensuite, pour faciliter la mémorisation, un jeu possible consiste à réemployer tous ces mots dans un texte de forme libre, le plus court possible.


 Amis, ou presque,
Vomissez vos mauresques
Et reniez vos utopies tantriques.
Compagnons, frères, brandissez vos fusils !
Faîtes jaillir de ces bâtons priapiques
De mortelles escarbilles.

Partez à l'assaut, campagnes et phalanstères,
Rasez uniment les empruntes des ministères !
La charité, les seigneurs munificents
Peuvent se la garder,
Et se taire.



Le résultat est souvent bizarre, mais l'objectif rempli !

19 janv. 2011

(Sans objet)

Je traverse une petite phase d'hyperactivité depuis une dizaine de jours, et je peine à publier des billets un peu approfondis sur le site. A la différence d'un blogueur que j'estime et qui a écrit récemment sur ce sujet, l'hyperactivité n'est pas un état naturel pour moi, ni une situation que je recherche.

Je suis plutôt méso-actif. J'aime que mes journées comportent aussi quelques moments où je sente le temps passer. Ce sont des intervalles où j'arrive à prendre du recul et à envisager quelques projets qui ne ressortissent pas du futur immédiat. Dans la pratique néanmoins, c'est souvent plus bordélique que ça.

Dernièrement, grâce ma résolution de quitter plus tôt mon travail et mû par certaines circonstances, j'ai enchaîné les séances de ciné, les petits restos, les séances sportives et les lectures. Je suis même allé au théâtre à Bordeaux ce week-end - sans doute l'une des premières fois depuis le collège... Question cinéma, j'ai rattrapé un peu mon retard en allant voir Another year, Arrietty et le petit monde des chapardeurs et - ce soir - Poupoupidou. Une petite parenthèse pour vous recommander chaudement ce dernier, original, bien réalisé et desservi par une B.O. d'enfer. Si vous consentez à suivre un conseil de ma part, écoutez la reprise par AVA de I wanna be loved by you (j'aurais voulu insérer le morceau directement dans le corps du message, mais je n'ai pas trouvé la bonne formulation html; c'est en écoute sur deezer).

Zut,
Je n'ai pas de chute,
Seulement un chut.
Ou un coup de casserole,
Sur l'occiput.

Bonne nuit !

16 janv. 2011

Phrases perdues

Pour faire suite à la publication de quelques phrases notées dans un carnet à idées (lien ici), voici une deuxième série, de plus ou moins bon goût comme vous le constaterez...


Intentions déshonnêtes

Écoute, je crois que tu as trop bu, il vaut mieux que tu restes dormir à la maison ce soir. Je vais te préparer un lit dans la chambre d'amants.


Cynique

Cette personne peu regardante sur l'orthographe avait écrit un message avant de se suicider par pendaison: "Ah ben, ça valait le cou de s'accrocher".


Réveil difficile

- Mon copain a le sommeil très lourd, il n'y a vraiment qu'une chose pour le réveiller: le seau d'eau.
- Ah bon, à ce point? J'espère au moins que tu mets du lubrifiant.

9 janv. 2011

Anti-constitution ?

Aujourd'hui j'ai visité l'exposition consacrée aux "nus académiques" au musée des Beaux-Arts de Bordeaux. De mémoire, les oeuvres présentées datent des XVII et XVIIIèmes siècles.

Il s'agit - apprend-on sur les panneaux explicatifs - de dessins réalisés à partir de modèles par des professeurs et des élèves de deuxième année de l'académie de dessin. Pourquoi des élèves de deuxième année ? Parce qu'en première année, les graines d'artistes travaillent le "nu idéal" à partir d'oeuvres de grands maîtres. Ce n'est qu'à partir de la seconde année qu'on les estime en capacité de dessiner des êtres de chair tout en apportant les corrections qu'impliquent les imperfections naturelles de leur corps. Bonjour le formatage !

Les dessins exposés ne représentent que des individus mâles. Alors pour être clair, cela ne me dérange a priori pas du tout - ;) - mais je ne me rappelle pas en avoir lu l'explication sur les divers panneaux introductifs et thématiques. Cela aurait dû atténuer ma surprise lorsqu'en sortant de l'exposition j'ai aperçu "Têtu" dans la liste des partenaires de l'évènement. Qu'il y ait ou non un lien avec le parrainage de la revue gay, je dois dire que la juxtaposition des dessins a fait poindre en moi une certaine concupiscence...

Bien qu'incompétent en la matière, les dessins m'ont paru d'une bonne facture. Et comme beaucoup, j'aime m'approcher physiquement des oeuvres - jusqu'au maximum autorisé - et sentir s'évaporer quelques-uns des secrets qui transforment des multitudes de coups de crayon, de craie ou de fusain en un assemblage sophistiqué de muscles, de chairs et d'os dont la volumétrie est retranscrite grâce aux jeux de contrastes et de lumière.

Mais voilà, tout cela reste très académique - on pourra à juste titre me rappeler qu'il suffisait de lire le titre de l'exposition pour le savoir. Pas de doute, la représentation du corps est la seule finalité de ces dessins; il n'y a pas de composition ni de mise en scène, ou alors celles-ci sont anecdotiques. En parlant des corps, je les ai trouvés très peu variés, engoncés dans le stéréotype du mâle à la constitution robuste et musculeuse, et dont l'épaisseur des cuisses évoque davantage le bovin que l'humain. Pour moi, ça ne correspond pas du tout au nu idéal ! Je comprends que pour représenter un Hercule crédible vêtu de sa peau de Lion et armé de sa grosse massue il faille l'incarner dans un homme bien charpenté - encore que... - mais pour un Apollon ou un Mercure, on doit pouvoir argumenter que le poids d'une harpe ou d'un caducée n'implique pas trois séances hebdomadaires de muscu !

***

Aujourd'hui, en allant courir, une subite douleur au genou m'a contraint à rentrer en marchant. Je n'aurais quand même pas renié quelques points de constitution supplémentaires...

4 janv. 2011

L'Ennui

Dans ce roman publié en 1960, Alberto Moravia revient à l'un des thèmes centraux de son oeuvre: la crise des rapports de l'homme et de la réalité.

C'est cette phrase extraite de la quatrième de couverture qui m'a donné envie de lire "L'Ennui".

Vous est-il déjà arrivé de vous sentir complètement déconnecté du monde - êtres et objets - qui vous entoure ? Moi oui, à certaines périodes. C'est cette incommunicabilité et l'impossibilité d'en sortir tout en ayant la conscience théorique que l'on pourrait peut-être s'en évader qui définissent l'ennui selon Moravia.

Je n'aurais pas spontanément fait le rapprochement entre cet état et l'ennui, mais je ne trouve pas illégitime de donner un sens nouveau à certains mots, au moins le temps d'un roman. Une fois défini et nommé ce manque de rapports avec les choses, et dès lors qu'on nous plonge dans la narration aux côtés d'un peintre italien qui s'ennuie, plusieurs questions se posent: peut-on vivre dans l'ennui, c'est-à-dire sans aucun rapport avec le réel et n'en pas souffrir? Sinon, comment rétablir des passerelles entre soi-même et la réalité?

Voilà des questions auxquelles j'étais impatient de trouver des éléments de réponse dans le roman que je n'ai pas lu (autant le dire tout de suite) avec le détachement du lecteur curieux et désintéressé, mais avec la légère anxiété du patient occasionnel qui espère qu'on lui proposera une médication.

Finalement, le livre m'a surtout intéressé parce qu'il a un peu répondu à une autre question qui m'intéressait tout autant: qu'est-ce qui fait que l'on sort finalement d'une crise?

Pour résumer l'histoire, disons que Dino, le narrateur, rencontre Cecilia, une jeune modèle plutôt belle qui semble indifférente à tout. Dino et Cecilia ont bientôt des rapports amoureux quotidiens. En la présence de Cecilia, Dino s'ennuie. Las de cet ennui, le peintre italien projette de quitter la modèle mais il se rend alors compte qu'il ne la possède pas, qu'il ne l'a jamais possédée, et que son absence le fait souffrir. Beaucoup souffrir, et de plus en plus.

Comment se sortir de cette spirale de souffrance?

Dino, plus ou moins consciemment, finit par précipiter sa voiture contre un arbre. L'accident ne le tue pas. Il se réveille à l'hôpital.

Ce que, faute de terme plus approprié, je devais appeler mon suicide n'avait rien résolu, mais l'avoir tout au moins tenté me faisait penser que j'avais fait tout ce qui était en mon pouvoir: je n'aurais pu faire davantage. [...] désormais, bien que sans espoir, il ne me restait plus qu'à vivre.

Dino se découvre alors libéré de son obsession de posséder Cécilia. [...] Je ne désirais plus la posséder, mais seulement la regarder vivre, telle qu'elle était [...]. Ainsi le seul résultat vraiment certain était que j'avais appris à aimer Cecilia, ou plutôt à l'aimer sans plus.

Que s'est-il passé intérieurement chez Dino? Moravia en dit à la fois peu et beaucoup:

Evidemment, quelque chose était advenu au moment où je m'étais précipité, en voiture, hors de la route, quelque chose que, faute d'explication meilleure, on pouvait définir comme l'écroulement d'une ambition insoutenable.

Si je ne dois retenir que quelques mots de "l'Ennui", ils sont là: l'écroulement d'une ambition insoutenable.

N'est-ce pas en renonçant définitivement à des envies impossibles que l'on sort d'une crise?

3 janv. 2011

Une nouvelle année

C'en est donc fini de 2010, une année pour moi laborieuse dans les deux sens du terme.

Ça a été l'année d'une crise, d'une sortie du placard et de l'ouverture de ce blog. J'ai découvert un peu d'Espagne, je suis devenu tonton. J'ai lu quelques bons livres, j'ai fait pas mal de sport, j'ai négligé mes cours de Japonais. Je me suis beaucoup investi dans mon travail - et mon dos me l'a finalement fait payer. J'ai franchi le cap de la trentaine. J'ai traversé quelques très longues journées avec le moral en-dessous de zéro.

Si je devais m'adresser des voeux pour 2011, je souhaiterais:
- que les mots viennent plus facilement lorsque je commence à écrire des billets sur ce blog (mon cimetière de messages inachevés va finir par se rapprocher du stock des publiés);
- continuer à essayer de mieux comprendre - avec des mots - le monde et moi-même.

Il y a déjà de quoi occuper une vie alors je ne charge pas davantage la barque.

Je vous souhaite une heureuse année 2011 !